Faits saillants :
- En février 2024, près de la moitié (49 %) des publications d’offres d’emploi canadiennes sur Indeed comportaient des renseignements relatifs au salaire, contre 22 % au début de l’année 2019.
- Si davantage d’offres d’emploi font maintenant mention de la rémunération, les renseignements relatifs au salaire sont devenus moins précis. L’écart médian entre les estimations de salaire les plus basses et les plus élevées (incluant les offres sans éventail salarial) a atteint les 18 % au début de 2024, contre 10 % cinq ans plus tôt.
- Moins d’un tiers des offres d’emploi dans plusieurs secteurs de cols blancs mentionnent le salaire, contre plus de 60 % pour les emplois principalement rémunérés à l’heure. Les éventails salariaux tendent à être plus larges dans les professions les plus rémunératrices.
- La part des offres d’emploi en Colombie-Britannique indiquant le salaire a fait un bond, passant de 49 % au troisième trimestre de 2023 à 76 % en février 2024, suite à une loi de novembre 2023 imposant la transparence des salaires publiés. Les augmentations les plus importantes ont été observées dans des secteurs où la mention du salaire était jusqu’alors rare. Toutefois, à ce jour, le changement de politique n’a pas eu de répercussions plus importantes sur le marché du travail.
Parmi les raisons incitant les travailleurs canadiens à chercher un nouvel emploi, un salaire plus élevé arrive en tête de liste. Pourtant, historiquement, les renseignements relatifs au salaire proposé pour un emploi se sont faits rares. Toutefois, la mention du salaire est devenue beaucoup plus courante dans les publications d’offres d’emploi au Canada. Parallèlement, la législation proposée en Ontario, qui fait suite aux récentes mesures prises en Colombie-Britannique, à Terre-Neuve et à l’Île-du-Prince-Édouard, pourrait encore changer la donne.
La part des publications d’offres d’emploi canadiennes sur Indeed comportant des renseignements sur le salaire a plus que doublé au cours des cinq dernières années. En février 2024, 49 % des publications mentionnaient un salaire, contre 22 % au début de l’année 2019. Parmi les offres d’emploi qui contenaient des renseignements sur le salaire le mois dernier, près des trois quarts indiquaient des salaires à l’heure, un peu moins d’un sur quatre annonçait des salaires annuels et une part beaucoup plus faible mentionnait un salaire mensuel, hebdomadaire ou journalier.
L’augmentation de la transparence des salaires publiés reflète en partie les changements apportés à la plateforme Indeed elle-même. Les employeurs sont invités à inclure des renseignements sur le salaire lorsqu’ils publient une offre d’emploi directement sur Indeed. Les changements relatifs à ces consignes ont été l’un des principaux facteurs à l’origine de l’amélioration de la transparence salariale globale au début de l’année 2020. Toutefois, la part des offres d’emploi contenant des renseignements sur le salaire continue d’augmenter régulièrement depuis 2022, y compris parmi les offres d’emploi en ligne provenant d’autres sources, comme les pages Web des entreprises.
Les employeurs mentionnent de plus en plus souvent un salaire dans les publications d’offres d’emploi, sans doute parce que cela contribue à capter l’attention des chercheurs d’emploi. Des recherches* antérieures d’Indeed ont révélé que les publications d’offres d’emploi comportant des estimations salariales recevaient plus de candidatures par jour et restaient actives moins longtemps que des publications similaires sans mention de salaire. Cet atout en matière de recrutement a pris une importance particulière dans un contexte où le marché du travail est devenu très tendu à la suite de la pandémie. Par ailleurs, un changement de culture chez les responsables des ressources humaines pourrait également jouer un rôle, la transparence salariale étant considérée comme un moyen de promouvoir un lieu de travail équitable.
Les éventails salariaux sont devenus la norme, rendant les salaires publiés moins précis
Les descriptions de poste au Canada mentionnent de plus en plus souvent un salaire, mais les renseignements fournis ne sont pas aussi précis qu’auparavant. Ainsi, le nombre d’offres d’emploi mentionnant des niveaux de rémunération exacts diminue, au profit d’éventails salariaux. Au début de l’année 2024, 21 % des publications d’offres d’emploi mentionnant un salaire indiquaient le niveau exact, contre environ 40 % en 2019. Il est plus fréquent que le salaire soit exact lorsqu’il est exprimé en heures (31 % avec le salaire exact) plutôt qu’en salaire annuel (10 % avec le salaire exact).
Comme pour la prévalence des salaires publiés, les changements apportés à la plateforme Indeed expliquent en partie le passage à la publication d’éventails salariaux, en particulier au début de l’année 2020. Toutefois, cette tendance s’est également poursuivie ces derniers temps parmi les offres d’emploi provenant d’autres sites en ligne. Cela suggère que l’inclusion d’éventails salariaux aide toujours les employeurs à capter l’attention des talents, tout en leur laissant une certaine marge de manœuvre pour négocier. La publication d’un éventail salarial moins précis peut également contribuer à apaiser les inquiétudes des employés en poste qui pourraient comparer leur salaire actuel à celui qui est annoncé.
Naturellement, le passage de salaires exacts à des éventails salariaux a rendu les renseignements sur le salaire en général moins précis. Parmi les offres d’emploi mentionnant un salaire exact ou un éventail salarial, l’écart médian entre les salaires les plus bas et les plus élevés publiés est passé de 10 % en 2019 à 18 % au début de l’année 2024. Les éventails salariaux eux-mêmes se sont également élargis, bien que le changement ait été moins spectaculaire. Si l’on exclut les publications indiquant des niveaux de rémunération précis, l’écart médian entre les offres les plus basses et les plus élevées est passé de 21 % à 25 %.
La transparence salariale a progressé partout, mais les renseignements relatifs au salaire restent beaucoup plus répandus pour les emplois généralement rémunérés à l’heure
La publication des salaires est devenue plus fréquente dans tous les secteurs de l’économie après 2019. Toutefois, en raison de l’augmentation similaire des points de pourcentage entre les professions, la prévalence des salaires publiés continue de varier de manière substantielle. Au début de l’année 2024, moins de 30 % des offres d’emploi dans les secteurs de cols blancs (finance, technologie et ingénierie, entre autres) incluaient des renseignements sur le salaire. À l’inverse, les salaires publiés figuraient dans plus de 60 % des offres d’emploi dans les secteurs du sport, de la sécurité, de l’entretien et de l’assainissement ainsi que dans plusieurs secteurs des soins de santé. La construction (60 % des offres d’emploi mentionnaient des données salariales) et la restauration (57 %) étaient aussi des secteurs relativement transparents, manquant de peu de figurer dans les 10 meilleurs secteurs.
Le meilleur indicateur de la prévalence des salaires publiés était lié au type de salaire (horaire ou annuel) habituellement proposé par les employeurs. La transparence était généralement moindre dans les professions où le salaire annuel était plus courant. La part des offres d’emploi en février 2024 mentionnant un salaire était inférieure à la moyenne dans l’ensemble de l’économie pour 11 des 12 professions dans lesquelles les salaires annuels constituaient la majorité des salaires publiés (l’immobilier étant la seule exception). À l’inverse, aucun des dix secteurs enregistrant les taux de transparence les plus élevés n’a indiqué plus de 20 % de ses salaires en termes annuels. Les employeurs pourraient se montrer plus réticents à publier des salaires en termes annuels plutôt qu’en heures, car cette dernière option laisse encore une certaine marge de manœuvre pour déterminer les coûts globaux de la main-d’œuvre.
Les éventails salariaux publiés sont de plus en plus larges à mesure que l’on avance dans la grille des salaires
Les professions moins bien rémunérées publient généralement des éventails salariaux plus restreints que les professions mieux rémunérées. Par exemple, l’éventail typique des salaires publiés dans les offres d’emploi pour le service à la clientèle n’est que de 6 %. Et il est encore plus faible pour les offres d’emploi dans les secteurs de la sécurité et de la défense publique ainsi que de l’entretien et de l’assainissement. Cela s’explique en partie par le fait que le salaire minimal fait office de plancher pour les salaires proposés à ces postes.
D’autre part, les salaires annoncés pour les postes dans le secteur de l’ingénierie, qui sont relativement rares au départ, varient généralement de 30 % entre les estimations les plus basses et les plus élevées. Si les offres d’emploi les plus rémunératrices dans le secteur des soins de santé, comme les postes d’infirmiers et de thérapeutes, mentionnent souvent un salaire, les éventails salariaux tendent aussi à être relativement larges. Les offres d’emploi dans le secteur de l’immobilier indiquent également des estimations de salaire assez élevées, sans doute en raison de leur structure de rémunération variable reposant sur des commissions. Ces tendances observées dans les éventails de salaires publiés se retrouvent également dans les niveaux de rémunération réels. Dans l’Enquête sur la population active, les professions dont les salaires médians sont plus élevés ont tendance à présenter les écarts de rémunération* horaire les plus importants entre le 90e et le 10e percentile.
La prévalence de la publication des salaires en Colombie-Britannique est montée en flèche après l’entrée en vigueur de la nouvelle loi en novembre
Si l’augmentation de la transparence salariale peut être attribuée en grande partie aux changements apportés à la plateforme Indeed et à l’évolution des stratégies de recrutement, la législation a aussi joué un rôle. En mai 2023, le gouvernement de la Colombie-Britannique a adopté la loi sur la transparence salariale* (Pay Transparency Act) qui, entre autres changements, exige que les offres d’emploi publiées après le 1er novembre 2023 dans la province contiennent des renseignements sur le salaire*.
Les effets de la nouvelle loi ont été immédiatement visibles sur Indeed. En effet, la part des offres d’emploi en Colombie-Britannique contenant des renseignements sur le salaire est passée de 49 % au cours du troisième trimestre de 2023 à 76 % en février 2024, soit 32 points de pourcentage de plus que dans le reste du Canada. Parallèlement, les éventails de salaires publiés se sont élargis, bien qu’une tendance similaire ait été observée dans d’autres provinces.
Les hausses de la fréquence de publication des salaires après novembre ont été en général plus marquées dans les professions ayant les salaires les plus bas au départ, et donc la marge de progression la plus grande. Plusieurs secteurs liés à l’ingénierie, la technologie et les assurances ont vu leur part de salaires publiés augmenter de plus de 35 points de pourcentage, tandis que la part des postes de direction a augmenté de 30 points de pourcentage. Des données sur le salaire annuel sont aussi mentionnées plus fréquemment, reflétant à la fois les types de professions qui ajoutent le plus de nouveaux salaires et une évolution dans ces secteurs qui consiste à indiquer de plus en plus souvent les salaires en termes annuels.
En revanche, les secteurs dans lesquels la publication des salaires était déjà courante, notamment les soins de santé, l’entretien et l’assainissement ainsi que la construction, n’ont pas connu d’évolution aussi importante. En février 2024, pas plus de 90 % des offres d’emploi analysées pour une même profession n’ont inclus de données salariales, preuve qu’il existe encore une marge de progression et que certains employeurs ne se conforment pas encore totalement aux nouvelles dispositions.
Jusqu’à présent, les répercussions du changement de politique de la Colombie-Britannique sur le marché du travail sont limitées
La nouvelle loi de la Colombie-Britannique relative à la publication des salaires pourrait affecter le marché du travail de plusieurs manières. Tout d’abord, elle pourrait modifier les niveaux de salaire que les employeurs annoncent aux candidats potentiels. Toutefois, il est difficile d’en évaluer les effets. Les employeurs contraints de commencer à fournir des renseignements sur le salaire pourraient être différents de ceux qui publient déjà des salaires, tandis que des tendances économiques plus larges ont déjà une incidence sur la croissance des salaires.
Dans l’ensemble, après rajustement des effets multiplicateurs, la croissance des salaires publiés dans les offres d’emploi sur Indeed en Colombie-Britannique a récemment ralenti, passant d’un rythme rapide de 5,7 % en glissement annuel en octobre 2023 à 4,7 % en février 2024. En comparaison, le rythme dans le reste du Canada est passé de 3,9 % à 3,5 % au cours de la même période. La croissance des salaires publiés étant à la fois plus élevée et plus volatile en Colombie-Britannique que dans le reste du Canada depuis 2021, il est difficile de savoir dans quelle mesure la nouvelle loi a contribué à ce récent ralentissement.
De manière plus générale, l’activité de recrutement pourrait également être affectée. Certains employeurs pourraient s’abstenir de publier une nouvelle offre d’emploi s’ils s’attendent à payer des salaires plus élevés, étant donné que les candidats disposeront désormais de plus de renseignements sur les niveaux de salaire de l’ensemble du marché. Toutefois, du moins à l’échelle de la province, les publications d’offres d’emploi en Colombie-Britannique ne sont pas restées à la traîne du reste du Canada au cours des derniers mois. Au contraire, la part de la Colombie-Britannique dans le total des publications d’offres d’emploi canadiennes sur Indeed a augmenté entre octobre 2023 et février 2024, se situant légèrement au-dessus de son niveau de l’année précédente.
Finalement, la question se pose de savoir si la transparence accrue des salaires publiés a eu une incidence sur les salaires réels des nouveaux employés. Jusqu’à présent, rien n’indique un changement substantiel, du moins par rapport à la volatilité habituelle des données. D’après l’Enquête sur la population active, entre décembre 2023 et février 2024, les salaires des travailleurs d’âge moyen (25 à 54 ans) nouvellement embauchés dans le secteur privé en Colombie-Britannique ont évolué de manière similaire par rapport aux salaires des travailleurs de la Colombie-Britannique en général ainsi que par rapport aux travailleurs nouvellement embauchés dans le reste du Canada. L’écart salarial en fonction du genre parmi les nouveaux employés en Colombie-Britannique a aussi peu évolué.
Il est peut-être trop tôt pour détecter les effets au sens large de l’augmentation de la fréquence de publication des salaires en Colombie-Britannique sur le marché du travail. Les lois sur la transparence salariale ont eu des effets plus notables ailleurs. Dans le Colorado, les salaires annoncés pour les emplois dans cet État ont augmenté suite à l’adoption de nouvelles lois locales, tandis que les salaires des nouveaux employés ont augmenté en Slovaquie après l’entrée en vigueur d’un mandat relatif à la publication des salaires. La mise à disposition de plus amples renseignements sur le salaire pour les chercheurs d’emploi pourrait améliorer la dynamique du marché du travail à plusieurs égards. L’apparition de ces effets en Colombie-Britannique, où une part importante des publications d’offres d’emploi fournissait déjà des renseignements salariaux avant l’entrée en vigueur de la politique, aura d’importantes répercussions sur le marché du travail de la province, mais aussi sur le reste du Canada.
Méthodologie
Les renseignements salariaux sont extraits de publications sur Indeed. Nous calculons la part des salaires publiés dans les offres d’emploi canadiennes en divisant le nombre d’offres d’emploi uniques contenant des renseignements salariaux au cours d’un mois donné, par le nombre total d’offres d’emploi canadiennes au cours de la même période. Les éventails médians de salaires publiés ne tiennent pas compte des offres d’emploi comportant des éventails ouverts (c’est-à-dire des salaires indiqués avec des termes comme « jusqu’à » ou « à partir de »). Toutes les estimations ponctuelles des parts et des éventails de salaires publiés pour les professions individuelles correspondent à des moyennes mobiles sur trois mois.
Pour suivre la croissance des salaires publiés, nous calculons le salaire médian publié pour un mois, un titre de poste, une région et un type de salaire (horaire, mensuel ou annuel) donnés, puis nous calculons la croissance des salaires en glissement annuel pour chaque combinaison de titre de poste, de région et de type de salaire, ce qui génère une distribution mensuelle. Notre mesure mensuelle de la croissance des salaires pour le pays est la médiane de cette distribution. Vous trouverez de plus amples renseignements sur les données et sur la méthodologie dans un document de recherche rédigé par Pawel Adrjan et Reamonn Lydon, « Wage Growth in Europe: Evidence From Job Ads » (en anglais uniquement), publié dans la série Economic Letter de la Banque centrale d’Irlande.
Les salaires des nouveaux employés dans l’Enquête sur la population active reflètent les calculs d’Indeed effectués à partir des microdonnées à usage public de cette enquête, en se concentrant sur les employés d’âge moyen du secteur privé ayant une ancienneté d’un mois ou moins à leur poste.