Le deuxième confinement avait marqué le retour des recherches pour des postes en télétravail de la part des candidats, mais le volume de postes disponibles en télétravail a stagné au premier trimestre. Alors qu’elle aborde un troisième confinement aux modalités plus souples que les deux premiers, la France affiche un retard préoccupant par rapport aux autres pays développés, alors même que le télétravail est un accélérateur de mutations sur le marché de l’emploi.

Principaux enseignements :

  • Seulement 5,3 % des offres sur Indeed.fr sont proposées en télétravail, contre 9,4 % en Italie, 8,5 % en Allemagne et 12,3 % au Royaume-Uni au 1er avril 2021;
  • Les secteurs en pointe sur le télétravail sont toujours les médias, la communication, le développement de logiciels, le marketing et l’information médicale ;
  • En conséquence, les candidats français utilisent beaucoup moins le mot-clé « télétravail » pour leurs recherches d’emploi par rapport à d’autres pays (près de 10 fois moins qu’aux États-Unis).

Le télétravail ne progresse plus dans les offres d’emploi proposées aux candidats en France : la part des offres mentionnant la possibilité de télétravailler se trouve sur un plateau depuis janvier. Les postes ouverts au télétravail représentent ainsi au 1er avril 2021 5,3 % du total des offres. Ceux-ci avaient connu une deuxième phase de croissance (après l’essor lors premier confinement au mois d’avril) dès la mi-septembre, favorisée par l’ajout d’une fonctionnalité sur Indeed.fr permettant de signaler aux employeurs la disponibilité d’un poste en télétravail et entretenue par le deuxième confinement. Malgré une situation sanitaire précaire pendant le premier trimestre 2021, qui a forcé les autorités publiques à durcir les mesures de restrictions à la mobilité, les employeurs n’ont pas amplifié leur recours au télétravail sur les postes à pourvoir. Parmi les emplois disponibles en télétravail, seuls 3 sur 10 le seraient de façon permanente, alors que les autres auraient vocation à passer en présentiel une fois la pandémie terminée. 

Cet attentisme est d’autant plus préoccupant que la France figure à présent en dernière position sur l’échantillon, assez large, de pays suivis sur l’adoption du télétravail. L’Italie, qui a approximativement suivi en 2020 la même trajectoire que la France, a vu depuis janvier considérablement augmenter son volume de postes accessibles en télétravail. Une explication possible est le niveau élevé de restrictions à la mobilité, qui peut inciter les employeurs à recourir davantage au télétravail. Le Royaume-Uni et le Canada affichent toujours des taux particulièrement élevés, supérieurs à 10 %. Quant à l’Australie, elle maintient son taux d’annonces disponibles en télétravail alors même qu’elle a quasiment vaincu la pandémie, signe que le télétravail a des chances de s’imposer après la crise. Enfin, l’Allemagne, avec 8,5 % des postes accessibles en télétravail, poursuit sa progression, remarquablement constante depuis le début de la crise.

L’adoption du télétravail varie fortement selon les secteurs, et le constat est similaire à celui que nous faisions en novembre. Les postes à pourvoir dans les médias et la communication ainsi que dans le marketing affichent un taux élevé de télétravail (respectivement 16 % et 14 %). Le développement de logiciels, l’information médicale, l’immobilier et la banque et la finance figurent parmi les secteurs dans lesquels il est relativement aisé de trouver des opportunités en travail à distance : la part du télétravail dans les annonces sur Indeed.fr y est supérieure à 10 %. Quelques secteurs affichent un taux quasi nul en raison de l’impossibilité de travailler à distance : le transport routier, la logistique, les métiers de la production et de la fabrication, la construction, la médecine dentaire, la maintenance et la réparation, les soins infirmiers, etc.  

Les médias et la communication, le marketing, l’information médicale, le développement de logiciels et l’immobilier sont les secteurs qui ont vu leur part d’offres en télétravail progresser le plus fortement. Cette évolution pourrait déboucher sur une nouvelle organisation du travail dans les secteurs concernés. À l’inverse, le cas de la culture et du divertissement interpelle : le secteur affichait un taux de télétravail de 11 % avant la crise, contre 7 % l’année qui a suivi.

Les recherches de la part des candidats sont quant à elles restées à un niveau très inférieur à celui des autres pays début avril, avec 0,3 % des recherches totales s’effectuant avec des mots clés en lien avec le télétravail. Les candidats français savent sans doute qu’il reste difficile d’obtenir un poste en télétravail en France dans beaucoup de secteurs, et utilisent donc moins cet axe de recherche que les candidats d’autres pays. Le fait que le chômage touche de façon prépondérante des personnes moins qualifiées et susceptibles de s’intéresser à des secteurs peu concernés par le télétravail peut également jouer un rôle.  Sur cet indicateur, les chercheurs d’emploi italiens utilisent dans plus de 1 % de leurs recherches des mots clés liés au télétravail, contre 1,2 % et 1,3 % pour le Royaume-Uni et l’Allemagne respectivement. En comparaison, plus de 3 % des recherches américaines mentionnent les mots-clés liés au télétravail, soit près de 10 fois plus qu’en France. 

Après un essor sur 2020, le télétravail marque le pas sur le marché du travail français, même s’il semble bien installé dans certains secteurs. Au-delà de l’intérêt sanitaire, tout porte à croire qu’un usage raisonné et pertinent du télétravail a des retombées positives en termes de productivité et de bien-être au travail, en plus de contribuer à diminuer les problèmes de mobilité géographique dans le pays.

Méthodologie

Les graphes et tableaux présentés dans cet article présentent la part des offres mentionnant des mots-clés en rapport avec le télétravail dans l’ensemble des offres (éventuellement dans l’ensemble des offres d’un secteur donné). Les mots-clés utilisés sont les suivants : « télétravail », « travail à distance », « travail de la maison », ainsi que des variants.