Résilience en dépit de l’incertitude à l’aube de 2023
- Le marché du travail au Canada est demeuré stable et vigoureux au quatrième trimestre de 2022, le taux de chômage et les licenciements restant bas.
- La hausse des salaires est restée dynamique tout au long du mois de novembre, alors que les augmentations de salaire ont maintenu leur cadence malgré des taux de changement d’emploi relativement faibles au cours de la seconde moitié de 2022.
- Après un recul au cours de l’été, les publications d’offres d’emploi au Canada sur Indeed sont demeurées nombreuses jusqu’au milieu de décembre, bien au-delà de leur niveau d’avant la pandémie, surtout pour les postes à salaires moyens et bas.
- Bien que les conditions soient restées résilientes en 2022, l’année 2023 s’annonce plus complexe, car la Banque du Canada vise à freiner la demande intérieure tandis que l’économie mondiale est chancelante.
Après avoir montré des signes de fléchissement au cours de l’été, le marché du travail au Canada s’est maintenu cet automne. L’élan s’est refroidi par rapport à la première moitié de 2022, mais l’emploi et les publications d’offres d’emploi ont bien résisté jusqu’en novembre, tandis que la hausse des salaires est restée forte, du moins en termes nominaux. Par conséquent, le marché de l’emploi a abordé la fin de 2022 dans un état solide, mais aussi dans une certaine incertitude à l’approche de la nouvelle année.
Le marché de l’emploi stagne, mais ne s’effondre pas
Lors de notre première mise à jour trimestrielle sur le marché du travail, couvrant les données jusqu’en août, l’Enquête sur la population active (EPA) révélait que le marché du travail au Canada était en perte de vitesse depuis trois mois. Depuis, les données se sont améliorées, révélant un bond en octobre, entre deux lectures assez stables en septembre et en novembre. Parallèlement, l’Enquête sur l’emploi, la rémunération et les heures de travail (EERH) a montré que la croissance de la masse salariale entre le printemps et octobre a été un peu plus forte que celle de l’EPA, mais aussi moins rapide que le rythme observé plus tôt dans l’année. Dans l’ensemble, ces deux indicateurs mettent en évidence le passage d’une dynamique d’expansion à une dynamique neutre au cours de la deuxième moitié de 2022.
Les secteurs en retard et en tête créent des emplois, les autres sont diversifiés
Au-delà de la tendance générale stagnante dans l’EPA entre mai et novembre, la hausse des emplois par secteur a été diversifiée, montrant un « schéma en U ». Certains secteurs où l’emploi est bien en deçà des niveaux d’avant la pandémie embauchent des travailleurs, comme l’hébergement et la restauration, l’agriculture et « d’autres » services (qui comprennent les soins personnels). Avec un taux de postes vacants dans le secteur de l’hébergement et de la restauration toujours élevé, le secteur peut encore s’améliorer, même face à un ralentissement cyclique plus large.
À l’autre extrémité du « schéma en U », l’emploi a aussi progressé au cours de la période de six mois dans les trois secteurs les plus éloignés de leurs niveaux de février 2020 : les services professionnels et techniques, l’administration publique ainsi que les finances, les assurances et l’immobilier. Ces données mettent en lumière une source abondante de chercheurs d’emploi de type cols blancs. Parallèlement, la croissance récente a été généralement plus faible dans les secteurs où l’emploi a davantage ressemblé à la tendance générale de l’économie depuis le début de la pandémie. Les emplois en construction et en soins de santé ont stagné au cours des six derniers mois, alors que les emplois en commerce de gros et de détail ont chuté de 4,4 %, car peu d’emplois ont été créés.
Un taux de chômage faible soutenu par des licenciements peu nombreux
La croissance plus faible de l’emploi reflète probablement à la fois un ralentissement de la dynamique économique et le fait que la reprise du marché du travail au Canada approche de ses limites. Le taux de chômage en novembre est demeuré à 5,1 %, en dessous de son taux d’avant la pandémie et tout juste au-dessus de son niveau le plus bas des dernières décennies, à savoir 4,9 %, atteint en juin. La baisse du chômage en 2021 et au cours de la première moitié de 2022 a été incroyablement rapide, mais toute autre progression sera difficile.
Si le taux de chômage est resté bas, c’est en partie grâce au nombre relativement faible de Canadiens qui ont perdu leur emploi au cours des derniers mois. Selon l’EPA, entre septembre et novembre, une moyenne mensuelle de 0,52 % des travailleurs au Canada était nouvellement sans emploi en raison d’un licenciement ou d’un renvoi. Le plus bas taux atteint au cours des dernières années pour la même période était de 0,60 % en 2018. Malgré certains signes de ralentissement dans ces secteurs, les taux de licenciement ont été égaux ou inférieurs à leur moyenne de 2017 à 2019 dans la plupart des secteurs, y compris la construction et le commerce de détail.
La hausse des salaires se poursuit malgré les mouvements limités du personnel
Le resserrement du marché du travail s’est traduit par une solide hausse des salaires nominaux, alors que les employeurs cherchent à la fois à attirer de nouveaux travailleurs et à fidéliser le personnel existant. Ceci dit, le point fort dont il est question varie entre les sources de données. Selon l’EPA de novembre, le salaire horaire moyen général a connu une forte hausse de 5,6 % année après année, tandis que les salaires corrigés de la composition de l’EPA ont également connu une forte hausse. À l’inverse, les données salariales de l’EERH montrent une hausse des salaires plus faible, proche de 4 %.
Le rythme soutenu de la hausse des salaires dans l’EPA a été assez généralisé, pour les professions faiblement rémunérées comme pour celles aux salaires élevés. Entre-temps, la hausse des salaires en novembre a été particulièrement vive dans une série de secteurs, notamment les services professionnels et techniques, l’hébergement et la restauration ainsi que la production industrielle.
Il est intéressant de constater que la récente hausse des salaires nominaux n’a pas coïncidé avec une forte augmentation du mouvement de personnel. Cette dernière peut stimuler la hausse des salaires, car ceux qui trouvent eux-mêmes de nouveaux postes obtiennent des augmentations, tandis que les employeurs sont incités à augmenter les rémunérations pour éviter le débauchage de leur personnel. Cependant, malgré le nombre élevé d’offres d’emploi dans l’ensemble de l’économie en 2022, les Canadiens sont légèrement moins susceptibles de changer d’employeur que par les années précédentes, surtout au cours de la deuxième moitié de l’année.
Selon Statistique Canada, l’absence d’augmentation du mouvement de personnel (contrairement aux États-Unis) peut s’expliquer par une plus grande proportion des employés optimistes quant à leurs perspectives de développement de carrière à leur poste actuel, par rapport aux dernières années. En parallèle, en octobre, 59 % des employés de longue date ont reçu une augmentation au cours de la dernière année, une proportion similaire à celle des 60 % de personnes ayant changé d’emploi pour passer à un poste mieux rémunéré, ce qui limite les avantages du changement d’emploi.
Les publications d’offres d’emploi se maintiennent face à l’incertitude
Compte tenu des perspectives économiques incertaines, il est possible que le faible taux de mobilité professionnelle en 2022 soit une occasion manquée pour certains chercheurs d’emploi. Cependant, jusqu’à maintenant, les occasions d’emploi demeurent nombreuses. Après un recul de 9 % entre le début de mai et septembre, les publications d’offres d’emploi au Canada ont résisté tout au long du quatrième trimestre. Au 9 décembre, elles étaient encore 67 % plus élevées que leur niveau d’avant la pandémie, sur une base prenant en compte les variations saisonnières. La volonté de recruter n’a peut-être pas été aussi vive qu’au milieu de 2022, mais elle est restée forte vers la fin de l’année.
Les tendances en matière de publications d’offres d’emploi ont été plus diversifiées sous les chiffres globaux. Le groupe des emplois à rémunération faible a progressé au quatrième trimestre, notamment dans les secteurs des services alimentaires, du nettoyage et de l’assainissement. L’élan a aussi été positif pour les emplois à rémunération moyenne, surtout pour les secteurs des cols bleus comme la construction et le camionnage qui, historiquement, ont été assez sensibles à la conjoncture. De plus, les emplois à rémunération élevée, principalement des offres d’emploi pour des postes de cols blancs, ont connu un recul, incluant des secteurs comme les banques et la finance et surtout les technologies. Ce recul est seulement partiellement contrebalancé par l’accélération dans d’autres domaines comme les soins infirmiers. Généralement, jusqu’à la mi-décembre, les publications d’offres d’emploi sont demeurées au-dessus des niveaux d’avant la pandémie pour presque toutes les professions. La question est de savoir si cet environnement restera identique en 2023.
La « désinflation immaculée », un chemin semé d’embûches
Sur le plan macroéconomique, le marché du travail au Canada pour l’année à venir est confronté à deux défis quelque peu interdépendants. Premièrement, le marché de chercheurs d’emploi qui a émergé de la pandémie peut-il persister? Deuxièmement, les salaires réels
(c.-à-d. rajustés en fonction de l’inflation) peuvent-ils inverser la tendance à la baisse observée en 2022 à la suite de la hausse des prix à la consommation?
La Banque du Canada a souligné que le marché du travail se trouve actuellement dans une position de « demande excédentaire », mais que son cycle de resserrement continu ramènera les conditions, y compris le nombre élevé de postes vacants, à l’« équilibre ». Cependant, même si la baisse des offres d’emploi est l’objectif directionnel de la politique, l’ampleur de la baisse nécessaire pour éliminer la demande excédentaire ne peut être jugée qu’après coup. Cela dépend de la réaction des autres conditions du marché du travail, comme le chômage
et la hausse des salaires.
L’évolution de la hausse des salaires présente un intérêt particulier, car elle se situe à la croisée de plusieurs tendances transversales. Les conditions tendues du marché du travail qui soutiennent la hausse des salaires nominaux se sont maintenues au quatrième trimestre malgré la poursuite des hausses de taux, alors que les employeurs sont bien conscients que l’inflation élevée limite l’évolution des salaires. Au même moment, l’incertitude économique élevée pourrait inciter certains employeurs à hésiter à opter pour des plans de rémunération plus élevés. Pour compliquer la situation, les tendances salariales pourraient se répercuter sur les prix.
Ainsi, pour parvenir à un scénario où le marché du travail demeure en bonne santé en 2023, c’est-à-dire où le chômage reste faible et où les salaires réels augmentent, il faudra compter sur la chance. Doivent notamment s’atténuer les facteurs mondiaux qui ont provoqué la hausse des prix des aliments, de l’énergie et des biens durables et qui ont donné le coup d’envoi de l’inflation au Canada en 2021. Il faut toutefois éviter que l’économie mondiale entre en récession. Cependant, la voie vers une « désinflation immaculée » est complexe.
Méthodologie
Tous les chiffres liés aux offres d’emploi dans ce billet de blogue représentent la variation en pourcentage des publications d’offres d’emploi prenant en compte les variations saisonnières depuis le 1er février 2020, en utilisant une moyenne mobile de 7 jours. Le 1er février 2020 est notre base de référence d’avant la pandémie. Nous corrigeons les variations saisonnières de chaque série en fonction des tendances historiques de 2017, 2018 et 2019. Chaque série,
y compris la tendance nationale, les secteurs professionnels et les zones géographiques infranationales, est désaisonnalisée séparément. Cette semaine, nous avons appliqué notre révision trimestrielle, qui met à jour les facteurs saisonniers et corrige les anomalies de données. Les chiffres historiques ont été révisés et peuvent différer des valeurs initialement communiquées. Les nouvelles offres d’emploi sont des publications datant de 7 jours ou moins.
Le nombre de publications d’offres d’emploi sur Indeed, que ce soit en matière de sollicitations d’emplois rémunérés ou non rémunérés, n’est pas une indication des revenus ou des bénéfices d’Indeed, qui comprend un pourcentage important du segment de HR Technology appartenant à son entreprise mère, Recruit Holdings Co., Ltd. Les chiffres relatifs aux offres d’emploi sont fournis à titre informatif uniquement et ne doivent pas être considérés comme un indicateur du rendement d’Indeed ou de Recruit. Veuillez consulter le site Web des relations avec les investisseurs de Recruit Holdings et les déclarations réglementaires au Japon pour obtenir des renseignements plus détaillés sur les recettes générées par le segment HR Technology de Recruit.